Astronomie gravitationnelle : le LMA sélectionné pour le traitement des miroirs de Kagra

Institutionnel

Le Laboratoire des matériaux avancés (LMA, CNRS) est spécialisé dans la réalisation et la caractérisation de couches minces. Fort de cette compétence, il a réalisé le traitement de surface des miroirs les plus importants des interféromètres Ligo et Virgo. Alors que l’astronomie gravitationnelle prend son essor suite aux découvertes de fin 2015, le LMA vient d’être sélectionné pour traiter les miroirs de l’interféromètre Kagra, actuellement en construction au Japon.

Les collaborations Virgo (en Europe) et Ligo (aux Etats-Unis) compteront bientôt un nouvel allié dans la détection et l’étude des ondes gravitationnelles : l’interféromètre Kamioka Gravitational Wave Detector(Kagra), actuellement en construction au Japon et dont la mise en service est prévue au plus tard en 2018. Tout comme les instruments déjà en opération, Kagra sera équipé de miroirs ultra-perfectionnés. Et leur traitement de surface sera réalisé au LMA à Villeurbanne, dans les mêmes machines uniques qui ont servi au traitement des miroirs de Virgo et Ligo.

 

Des miroirs en saphir à -263°C

Le projet Kagra est coordonné par l’Institute for Cosmic Ray Research (ICRR) de l’Université de Tokyo, auquel sont associés la High Energy Accelerator Research Organization (KEK) et le National Astronomical Observatory of Japan (NAOJ). Ses particularités sont d’être souterrain (pour limiter le bruit sismique) et de comporter des miroirs cryogéniques en saphir (maintenus à -263°C pour réduire le bruit thermique). Un consortium dont fait partie le LMA a été retenu pour la réalisation des miroirs suite à un appel d’offres.

Le LMA est une unité de service et de recherche (USR) de l’IN2P3 spécialisée dans le dépôt de couches minces, notamment à des fins optiques. L’Université de Tokyo lui avait déjà commandé en 2014 six grands miroirs secondaires, puis des tests de performances pour les miroirs principaux en saphir destinés à Kagra. C’est donc tout naturellement que le laboratoire s’est positionné, avec son partenaire japonais, sur cet appel d’offres.

Image retirée.
Mesure de la planéité d’un miroir de 35 mm de diamètre dans un interféromètre de Fizeau à décalage de longueur d’onde. Cet instrument permet de mesurer les bosses et les creux d’hauteur nanométriques à la surface du miroir. Grâce à cette mesure suivie de simulations optiques, les chercheurs peuvent estimer les pertes de lumière liées à ce miroir, lorsqu’il sera installé dans l’interféromètre Advanced Virgo. © Cyril FRESILLON/LMA/CNRS Photothèque

 

Un défi technologique de taille

Alors que pour les miroirs de Virgo et Ligo, les traitements de surface sont réalisés sur du verre, réaliser des miroirs en saphir représente un défi technologique tant du point de vue de la fabrication du substrat et de son polissage que de la réalisation des couches minces. En effet, si le dépôt de couches minces sur verre est bien connu, celui sur des substrats en saphir de cette taille est une première. Ce travail nécessitera de réaliser des dépôts tests permettant de valider les performances attendues des couches minces.

Au sein du laboratoire, toutes les étapes du dépôt se font sur un même lieu, en salle blanche (classe ISO 3) pour limiter les défauts : l’environnement est parfaitement contrôlé, du traitement aux contrôles. Le LMA dispose de la plus grande enceinte de dépôt au monde de pulvérisation par faisceaux d’ions, permettant la réalisation de grandes pièces jusqu’à 1 m de diamètre ou de deux miroirs simultanément pour garantir leur compatibilité optique. Les miroirs du LMA réfléchissent 99,9999 % de la lumière, contre 90 % environ pour un miroir de salle de bain.

Cette commande inédite de miroirs en saphir de grandes dimensions (22 cm de diamètre et 15 cm d’épaisseur) va encore étendre le champ d’expertise et la renommée du LMA. Mais le laboratoire est aussi engagé sur d’autres fronts, comme le futur Einstein Telescope (la troisième génération d’interféromètres), le projet LISA (mission spatiale dédiée aux ondes gravitationnelles dont le lancement est prévu dans les années 2030) ou le Large Synoptic Survey Telescope (LSST, actuellement en construction au Chili).

Image retirée.
Salle blanche de 150 m². A droite, le Grand Coater est le plus grand bâti de dépôt sous vide au monde. Cet équipement est utilisé pour déposer des couches minces sur des substrats de verre de grandes dimensions (jusqu’à 800 mm de diamètre) afin de les rendre réfléchissants. Conçu et développé par le Laboratoire des matériaux avancés (LMA), il utilise la technique de pulvérisation par faisceau d’ions (ion beam sputtering). Les miroirs faibles pertes (350 mm de diamètre, 200 mm d’épaisseur, 40 kg) des interféromètres Advanced Virgo et Advanced Ligo ont été réalisés dans ce Grand Coater. © Cyril FRESILLON/LMA/CNRS Photothèque
 

Pour en savoir plus